Comment suis-je devenu un homéopathe ?
Peut-être qu’il ne serait pas inintéressant pour les lecteurs que je traite de l’origine de ma conversion à l’homéopathie. Comme c’est souvent le cas, je n’en connaissais absolument rien lorsque je passai mon diplôme, puisqu’elle est rarement mentionnée par les professeurs des écoles médicales ordinaires, et alors seulement pour en donner une mauvaise image. Après que j’aie été diplômé à Edinburgh, sur le conseil du Dr. Angus Macdonald (un des meilleurs amis que je n’aie jamais eu), je fis un voyage en Nouvelle Zélande en charge des émigrants.
A mon retour, m’étant installé à Liverpool, cherchant une discipline dans laquelle démarrer ma pratique, je demandais au Dr. Macdonald de m’introduire à certains des médecins éminents de cette ville. Ce qu’il promit de faire et qu’il fit finalement. J’ai encore les lettres aujourd’hui. Elles n’ont jamais été révélées.

Il se trouvait que les connaissances auprès de qui je séjournais étaient homéopathes, et qu’elles me suggéraient que je ferais pire que d’aller au dispensaire homéopathique sur Hardman Street pour regarder ce qu’il s’y passait. Comme les lettres tardaient à arriver, histoire d’utiliser le temps dont je disposais, je m’y suis rendu. Comme César, non seulement j’y suis allé mais je vis, et ici finit le parallèle, je ne conquis point. Mais l’homéopathie me conquit.
Je devrais dire qu’à cette époque, ayant assimilé 80 pour cent (si ces chiffres aient un quelconque sens) de la tradition pharmaceutique que Sir Robert Christison (ndlt, médecin et toxicologue britannique) avait à transmettre, et ayant eu suffisamment d’opportunités pour tester sa valeur dans la pratique, j’en étais presque arrivé à la même conclusion que Oliver Wendell Holmes (médecin à Boston), qu’il exprima clairement : « si tous les médicaments étaient jetés à la mer, ce serait tellement mieux pour l’homme mais tellement pire pour les poissons ».
Je croyais que (et cette croyance est devenue très à la mode depuis) que la première fonction de l’homme de médecine était de trouver ce qui n’allait pas chez les gens (s’il le pouvait, et de leur fournir du bon sens s’il en était pourvu). Son devoir était de traiter les gens, les soigner était hors de question. Et il aurait été aussi bien pour son honnêteté s’il n’en avait pas la prétention.

Après quelques semaines d’observation au dispensaire homéopathique de Liverpool, un cas se présenta à moi en privé. Un jeune garçon de 5 ans de ma connaissance, me fut emmené par sa mère. Deux ans auparavant, il fut méchamment griffé au front par un chat, et quand les griffures eurent guéri, une poussée de verrues apparut au même endroit. Et elles y restèrent depuis ce temps malgré le traitement diligent du médecin de famille. D’allopathe à homéopathe, pour voir si cela pouvait m’aider, je consultai les autorités et découvrit que le principal remède qui fut crédité par la production de verrues fut Thuja Occidentalis. Je le commandai, plus pour l’expérimenter que pour en attendre un quelconque résultat. Tout en me disant que s’il y avait la moindre vérité dans l’homéopathie, cela devrait soigner. En quelques jours, l’amélioration fut manifeste. En trois semaines les verrues disparurent. A tort ou à raison, j’attribuai, et j’attribue encore, le résultat à Thuja, quoiqu’il ne fit pas de doute qu’on aurait dit que la magie eut donné donné un résultat similaire.

Très bien. Si quelqu’un pouvait me donner un système magique que je puisse utiliser avec précision et produire grâce à lui des effets aussi évidents, et mieux, je serais ravi de l’essayer. Dans ces circonstances, j’en vins à la conclusion que si l’homéopathie pouvait me donner de tels résultats, c’est qu’elle était un système qui me convenait. Et en toute modestie, l’homéopathie a œuvré ainsi pour moi depuis lors, pour une période de quelques trente ans.

A partir de maintenant, je quitterai les questions personnelles pour continuer à proprement parler sur le sujet.
L’homéopathie, l’allopathie (ndlt, « soigner par ce qui est différent ») et « enanthiopathie » (ndlt, « soigner par l’opposé ») : trois façons d’exploiter l’action des médicaments. Pourquoi la section allopathique de la profession devrait être aussi courroucée de Hahnemann n’est pas une petite surprise. Car non seulement Hahnemann découvrit l’homéopathie, mais il découvrir l’allopathie également. L’allopathie existait avant son temps, comme l’homéopathie existait en quelque sorte, tout en étant inconsciente de sa propre existence. La profession a résisté à l’allopathie durant toute sa vie sans le savoir (comme M. Jourdain faisait de la prose sans le savoir). C’est Hahnemann qui lui donna son nom. Et s’il est le père de l’homéopathie, il serait au moins autant le parrain de l’allopathie, et à ce titre il mérite d’avoir son buste dans les deux sections des écoles de médecine.

Hahnemann a souligné qu’il existait trois façons principales d’utiliser les médicaments : l’homéopathique, l’allopathique et l’antipathique ou enantiopathique. L’homéopathique c’est la méthode du similaire dans laquelle un médicament est donné à une personne malade parce qu’il est capable de produire un état semblable lorsqu’il est donné à une personne saine, soit similia similibus (curantur), soit les « semblables guérissent les semblables ».
La méthode allopathique ou hétéropathique c’est lorsqu’on donne un remède qui n’a aucune relation pathologique avec ce qui est malade dans le corps, attaquant la partie la plus exempte de la maladie.
L’enanthiopathie est l’opposé de l’homéopathie, c’est le traitement par les les contraires. Le traitement est purement palliatif, lorsqu’une grande dose d’opium est donné pour surmonter la somnolence ou quand un astringent est donné pour arrêter une diarrhée, ou encore un purgatif est donné pour éliminer la constipation. Ce sont tous des exemples de traitements antipathiques.
Mais bon nombre de maladies, telles que les inflammations par exemple, ne possèdent aucun principe opposé, à part la santé, et ceux-là ne peuvent être traités par aucune méthode, et doivent être traités dans une ou l’autre des deux premières méthodes (ndlt, il apparaît que les anti-inflammatoires aujourd’hui répondent bien à cette troisième catégorie).

Quand un émétique est donné pour soulager un « coup de froid » à la poitrine, une action est produite différente par la localisation et la nature de la condition traitée, et cela est allopathique. Ou encore, lorsqu’un patient se traite lui-même pour un mal de tête un laxatif, il pratique l’allopathie. Quand un homme de médecine place une ventouse derrière l’oreille d’un patient pour guérir une inflammation oculaire, le traitement est encore allopathique.
Si par contre on donnait pour un cas de mal de tête un remède comme Belladonna ou Glonoine (nitro-glycérine), les deux substances produisant une variété de maux de tête de grande intensité lorsqu’elles sont ingérées par quelqu’un en bonne santé, alors nous pratiquons l’homéopathie.

C’est vrai que la majorité de la profession médicale méprise l’idée qu’il puisse exister une règle qui les guide dans la pratique, et que pour cette raison, je suppose, selon le principe lucus a non lucendo (ndlt, « deux choses sont liées parce qu’elles sont une signification opposée »), insiste pour ne pas l’appeler autrement que « régulier ». S’ils ne méprisaient pas la logique autant que les règles, ces praticiens pourraient s’appeler des anarchistes médicaux.

The principle of cure by medicines revealed by Hahnemann

Feu Sir Andrew Clark était un de ceux ayant effrontément proclamé le règle de l’anarchie médicale. Dans une allocution publiée peu après sa mort, Sir Andrew disait, en référence à la maladie dont il discutait : « il n’existe pas de principes fixes au traitement de la maladie », avant d’ajouter « la médecine c’est l’une des sciences possédant le moins de principes. » Une telle déclaration, bien que suffisamment vraie à propos de la médecine qu’il connaissait de Hahnemann et de son travail, exige un déni énergique.
Il y a moins de cent ans cela aurait été vrai, mais depuis l’émergence d’un désir de principe en médecine se soit vigoureusement imposé dans l’esprit de Hahnemann, qui le poussa à des tâches titanesques par lesquelles il apporta un ordre au chaos, le reproche d’absence de principe repose uniquement sur cette partie de la profession là, celle qui refusait obstinément d’accepter le cadeau qu’il avait offert au monde.
Combien de temps faudra-t-il pour apporter le changement, personne ne le sait. Mais tôt ou tard l’école de Sir Andrew Clark devra ouvrir les yeux sur le fait que la médecine n’est pas sans principe, une chose anarchique qu’ils proclament être. Encore et encore, dans ses premiers écrits, Hahnemann déplora l’absence de principe pour découvrir les pouvoirs curatifs des remèdes. Que dans un univers ordonné des lois, certains principes, doivent exister, il n’en doutait pas. Comment il entreprit la recherche qui finit par sa découverte de la loi des semblables, sur laquelle il a édifié un réel Art et Science de Guérir, sera discuté plus tard dans mon résumé de la carrière de Hanemann. Mais j’ajouterai aux remarques de Sir Andrew Clark un autre énoncé par quelqu’un de sa propre école, enregistré lors des Conférences sur l’Homéopathie du Dr Granier. Le prédécesseur de Sir Andrew Clark, tout en donnant une description claire de l’état d’anarchie dans lequel se trouvait la médecine traditionnelle, avait eu la candeur d’admettre que l’homéopathie était complètement différente.

Au cours d’un débat sur la « Révulsion », qui eut lieu à l’académie de médecine de Paris autour de l’année 1853, le Dr Marchal de Calvi contribua avec un essai dans lequel, toute en prenant soin de dire qu’il n’était pas lui-même un défenseur de l’homéopathie, il décrivit son désir que son école dispose de principes, ainsi que le fait que l’homéopathie possède des principes ou une doctrine.
« En médecine », dit Marchal, « il n’y a, ni n’a eu depuis longtemps, de principe, de croyance ou de loi. Nous construisons une tour de Babel, ou plutôt nous ne sommes pas loin de ne rien construire du tout. Nous nous trouvons dans une vaste plaine où une multitude de gens déambulent en avant et en arrière. Certains portent des briques, d’autres des pierres, d’autres encore des grains de sable. Mais personne ne rêve d’un ciment : les fondations de l’édifice ne sont pas encore coulées, et pour ce qui est du plan général, la littérature médicale fourmille de faits, en majorité produite périodiquement avec une monotonie des plus fatigantes. Ils sont appelés observations et faits cliniques, où quelques ouvriers considèrent et reconsidèrent des questions particulières de pathologie ou de thérapeutique, ceci étant qualifié de travail original.
La masse d’un tel travail et recueil de faits est énorme, aucun lecteur ne peut s’y retrouver, mais personne n’a de doctrine générale. La doctrine la plus générale qui existe est celle de l’homéopathie. Ceci est à la fois étrange et lamentable, une insulte à la médecine, mais c’est un fait.

L’ignominie de l’ancienne école de médecine en 1853 est bien plus grande lorsqu’elle proclame de manière éhontée par la voix d’un de ses éminences en 1893, comme étant le seul système qui possède le principe de guérison comme fondement, et cela sans aucune réserve en faveur du seul système qui existe, le système homéopathique.
L’allopathie ou la médecine orthodoxe a cependant autant à en dire à ce propos. Bien qu’elle n’ait aucune règle, aucune doxa, aucun système, elle possède un but asse bien défini, celui de pallier. Il a développé avec beaucoup de succès des tas de mesures pour soulager la douleur et supprimer les symptômes. Ceci est d’une grande importance et avantage, comme avec l’usage des anesthésiques, on ne peut le nier. Mais ce n’est pas sans danger également.
Un auteur de la presse quotidienne a récemment exprimé ce point avec beaucoup de force dans le passage suivant : « où la pharmacie moderne fait des merveilles c’est dans le traitement des symptômes, et c’est là que réside le danger pour un public impatient et peu enclin à penser. Qui peut dire à quel point l’épuisement nerveux et physique de la vie moderne n’est pas dû aux moyens abondants fournis par le chimiste pour éteindre les signaux naturels du danger ? »

La réponse à cette question est que beaucoup de bêtises en sont certainement la cause, mais l’homéopathie est une science capable d’utiliser les symptômes sans les masquer, de les considérer comme guide and les supprimer en guérissant le patient. Tandis que l’allopathie recherche d’abord d’éliminer tous les signaux de danger, l’homéopathie est capable par le biais des signaux, d’atteindre et d’annihiler le danger lui-même.
L’homéopathie, en révélant le principe de guérison, fait la lumière sur toutes les autres méthodes d’utilisation de remèdes. L’homéopathe peut se servir de n’importe quelle forme qui puisse sembler à l’avantage du patient. Seulement, il ne doit pas s’illusionner avec l’idée que pallier les symptômes est équivalent à guérir les patients. Le terme homéopathie tire avantage de la méthode homéopathique d’étude des remèdes.

Exemples

C’est peut-être l’occasion ici de clarifier que le terme Homéopathie n’inclut l’infiniment petit dans sa signification. C’est d’origine grecque, et signifie littéralement « pareil que la souffrance ». Ceux qui aiment être autorité sur tout ce qui concerne les saintes écritures peuvent être intéressés au fait que dans sa forme adjective, le terme apparaît deux fois dans l’Ancien testament, et qu’il est traduit dans les deux cas comme « similaire aux passions » (Acte XIV. 15, Évangile Saint Jean verset 17). Curieusement, Saint Luc, le médecin parmi les évangélistes, est un des deux auteurs de ce terme.
Pour autant que je sache, il n’existe aucune sainte écriture mentionnant l’allopathie.

Comment la notion d’infiniment petit se trouve rattachée au mot homéopathie n’est pas difficile à retracer, et l’importance de la découverte de Hahnemann du pouvoir des infinitésimaux sera traitée ultérieurement, mais Hahnemann choisit « homéopathie » pour incorporer en un seul terme la notion de « semblable ». Similia similibus curantur (les semblables sont guéris par les semblables) exprime la même chose en latin. Ceci est seulement ceci est le sens étymologique du mot.
Cette idée, Hahnemann n’a pas prétendu en être l’origine. De fait, il avait amassé laborieusement à partir des écrits précédents de toutes les époques, une somme de preuves montrant d’autres avant lui avaient reconnu une relation entre l’action des remèdes rendant malade les bien portants et leur action curative chez les malades. Ce que Hahnemann fit que les autres ne firent pas, c’est d’étudier les remèdes systématiquement en les testant sur les bien portants.

L’autre voie pour étudier les remèdes c’est celle qui existait avant, en les essayant sur les malades puis en observant ce qui se passe. Et, je dois dire, beaucoup d’informations très précieuses ont été obtenues de cette manière. Mais jusqu’à ce que Hahnemann étudia les remèdes en les testant sur les bien portants, cette information était plus ou moins indéfinie. De plus, le système ancien avait engendré une sorte de cercle vicieux dans la pensée médicale. Ayant découvert par expérimentation qu’un remède X calmait les spasmes dans un cas, était donc appelé « antispasmodique » et ce mot était censé expliquer ses vertus. Dès lors, le remède fut donné dans les cas de « spasmes » parce qu’il était antispasmodique. Mais en réalité qualifier d’antispasmodique ne dit rien d’autre sur ses pouvoirs réels que ce que Molière dit sur les propriétés soporifiques de l’opium (« qu’il a une vertu dormitive »). Par ses expérimentations, Hahnemann ajouta au savoir ancien de cette manière : il montra que les remèdes qui avaient le pouvoir de détendre les spasmes chez les malades, avaient également le pouvoir de causer des spasmes chez les bien portants. Et il montra ensuite que chaque remède causant des spasmes avait des particularités qui devenaient un guide pour sa sélection dans n’importe quel autre cas de maladie.
Il n’existe rien de tel que des « maladies » dans le sens abstrait de traiter seulement les personnes malades. Et chaque cas doit être individualisé et traité selon ses propres mérites, et non en fonction du nom de la maladie par quelque remède qui aurait été appelé « anti » à elle.

Pour prendre un exemple concret, examinons deux remèdes : Bryonia et Rus Toxicodendron. Chacun de ces remèdes, lorsqu’il est pris par des bien portants, produisent d’intenses douleurs rhumatismales dans les articulations, les ligaments et les muscles. Mais Hahnemann a noté sur lui-même et sur d’autres expérimentateurs cette différence marquée : tandis que les douleurs rhumatismales de Bryonia faisaient rester les expérimentateurs immobiles pour ne pas aggraver les douleurs, les douleurs de Rhus, à l’inverse, les rendait extrêmement agités, car le mouvement leur procurait un soulagement temporaire. Ceci donna à Hahnemann la clé sur leur usage dans les maladies, Bryonia étant efficace contre les douleurs aggravées par le mouvement, et Rhus contre celles qui étaient améliorées par le mouvement. Il n’aurait servi à rien de les avoir appelés « anti-rhumatismales », alors il se contenta d’enregistrer leurs effets positifs au lieu de perdre du temps à leur trouver un nom.

Une nouvelle science nécessite une nouvelle terminologie, et il faudrait ici expliquer certains termes techniques de Hahnemann. Lorsque Hahnemann expérimentait un remède sur des bien portants, il appelait cela « éprouver » un remède. Il utilisa, bien-sûr, le mot allemand Prüfung un essai.
En mathématiques on prouve nos résultats en faisant le calcul inverse. Ainsi Hahnemann éprouva les pouvoirs des remèdes pour guérir les malades en observant les symptômes causés par ceux donnés aux bien portants. Quelqu’un qui prenait un remède dans le but d’en observer les effets était appelé un « éprouveur » (ou « vérificateur »). Les effets d’une telle expérimentation était appelé une « épreuve » (ou « démonstration »).

Esquisse de la carrière de Hahnemann : la recherche pour un principe en médecine

Maintenant il est temps de dire quelque chose sur Hahnemann lui-même, et de comment il découvrit la méthode systématique d’étude des pouvoirs des remèdes, pour découvrir le principe en médecine que Sir Andrew Clark disait n’existait pas.

Samuel Frederick Christian Hahnemann est né à Meißen en Saxe (Allemagne) le 10 avril 1755. A l’âge de 20 ans, il commença ses études médicales à Leipzig, et gagna sa vie en traduisant en allemand les travaux scientifiques étrangers, en même temps qu’il poursuivait ses études. Après deux ans à Leipzig, il déménagea à Vienne, afin de gagner un savoir faire dans les grands hôpitaux là bas. Il fut diplômé en médecine à Erlangen en 1779.

Hahnemann était un excellent linguiste, parfaitement familier de l’anglais, italien, français, grec, latin et arabe.
Encore étudiant il traduisit de l’anglais, entre autres oeuvres, l’Essai sur l’hydrophobie de Nugent, les Essais physiologiques de Stedman, et la Pratique moderne de la physique de Ball. A partir de 1779, il contribua à la littérature périodique et en 1784, à l’âge de 29 ans, il publia sa première oeuvre originale « Sur le traitement des ulcères ». Il y expirma à peu près le même sentiment que celui que j’ai cité de Sir Andrew Clark sur la nécessité d’avoir un principe en médecine. Il ne pouvait pas nier que les remèdes avait des pouvoirs curatifs, mais ce qu’il voulait c’était un principe qui le guide dans la découverte et la définition de ces pouvoirs, et les indications sur leur utilisation.

Hahnemann était un maître en matière de chimie pratique et il écrivit beaucoup à ce sujet. Son livre sur l’Empoisonnent à l’Arsenic, publié en 1786, fut cité comme une autorité par Christison dans son travail sur les Poisons. En 1787, Hahneman découvrit le meilleur test pour l’arsenic et autres poisons dans le vin par le biais d’eau hydrogénée sulfurisée et acidulée, en ayant indiqué la nature peu fiable du test Würtemberg (ndlt, test pour détecter le vin frelaté), qui était utilisé jusque là. En 1788, il annonça sa découverte d’une nouvelle préparation à base de mercure, connue à ce jour (ndlt, 1905) comme le « Mercure soluble de Hahnemann », gardé sous ce nom dans la pharmacopée allemande. Sa familiarité intime avec les remèdes et leur mode de préparation lui permit d’écrire son Apothekerlexicon (ndlt, « Lexique de l’apothicaire »), ou « Dictionnaire pharmaceutique », qui apparut en plusieurs volumes de 1793 à 1799, et fut pendant de nombreuses années le travail de référence sur le sujet.

Hahnemann ne s’est pas exclusivement distingué par la découverte du système homéopathique , il fut un pionnier pour plusieurs réformes médicales.
Par exemple, c’est lui qui adopta le premier le système non restreint pour traiter les aliénés (ndlt, il s’agit de retenues mécaniques pour restreindre les mouvements des personnes atteintes de folie, techniques qui furent progressivement abandonnée en Angleterre à partir des années 1838). Je citerai Dr. Dudgeon pour une description historique : « En 1792, Hahnemann entreprit les soins du célèbre homme d’Etat de Hanovre Klockenbring, qui perdit la raison, et était déjà traité de la manière barbare usuelle de ce temps-là dans un asile de facture ordinaire, sans aucun bénéfice, bien au contraire. Hahnemann traitait ce dangereux dément avec un plan sans restreinte, sans utiliser des chaînes ou ni de punitions corporelles, qui était universellement utilisées pendant cette période. Son traitement fut un succès et Klockenbring fut rendu à sa famille et ses amis parfaitement guéri. Hahnemann dit dans un rapport de ce cas : « je ne permets jamais à une personne non saine d’esprit d’être punie soit par des coups soit par tout autre type de châtiment corporel, parce qu’il ne peut y avoir de punition sans responsabilité, et parce que ces malades méritent seulement de la pitié, et que leur état s’en trouve toujours aggravé par un traitement si dur, jamais amélioré. »
Après ce traitement, dit Ameke, Klockenbring montra à son libérateur « souvent avec des larmes aux yeux, les marques des coups et des bandes que ses gardiens avaient employé pour le maintenir calme ».

Mais nous remonterons encore un peu le temps. Après 1788 Hahnemann semble avoir abandonné la pratique par dégoût. Dans une lettre à Hufeland, nesteur de médecine en son temps (d’où provient le nom du Journal Hufeland dont Hahnemann fut u contributeur régulier), il dit que son retrait était la conséquence de son dégoût des incertitudes de la pratique médicale, dues à l’absence de tout principe dans l’administration des remèdes dans une maladie. Durant ce temps, il s’occupa en effectuant des recherches en chimie et la traduction d’oeuvres de chimie, d’agriculture et de médecine de l’anglais, français et italien.

C’était pendant qu’il traduisait la Matière Médicale de Cullen en 1790 qu’il fit l’observation classique qui se révéla être à la science de l’étude des remèdes, ce que fut la chute de la pomme observée par le jeune Newton à la science physique. Comme son esprit était toujours occupé par la recherche d’un quelconque principe pour la sélection des remèdes dans les maladies, il fut frappé par la nature insatisfaisante des explications de Cullen sur l’action de l’écorce de Cinchona dans le traitement du paludisme. Que la substance puisse soigner bon nombre de cas de paludisme, cela Hahnemann ne le niait pas, mais il lui traversa l’esprit que s’il prenait le remède lorsqu’il se portait assez bien, il pourrait obtenir des indices pour l’explication de ses actions curatives. Il en absorba des quantités considérables et produit en lui-même tous les symptômes d’une attaque ordinaire d’une fièvre intermittente.
Le compte-rendu de l’expérience sera trouvée en note de bas de page 108 du volume II de sa traduction de la Matière Médicale de Cullen. Ici, Hahnemann était en possession de deux faits liés : l’écorce de Cinchona soignait le paludisme, et elle causait, chez une personne sensible et bien portante, les symptômes similaires à ceux d’une attaque de paludisme.

Une observation de cette sorte ne pouvait rester infructueuse dans un cerveau aussi fertile que celui de Hahnemann. L’année suivante, en 1791, il traduisit la Matière Médicale de Monroe et dans une note il se se réfère encore à ses expériences avec le Cinchona. Cinq ans après, en 1796, étant âgé de 41 ans, il publia dans le Journal de Hufeland, un essai sur le « Nouveau principe pour découvrir les pouvoirs curatifs des remèdes ». Il y discute les différentes façons par lesquelles les remèdes ont été précédemment étudiés et utilisés, et il décrit alors la méthode du « semblable », la règle du « semblable par le semblable » (similia similbus curantur) ainsi formulé pour la première fois : « Chaque substance médicinale active produit dans le corps humain un type particulier de maladie, plus le remède est puissant, plus la maladie sera particulière, marquée et violente. Nous devrions imiter la nature, quin parfois guérit une maladie chronique en surajoutant une autre maladie, et emploie dans la maladie que nous souhaitons soigner, la maladie qui est capable de produire une autre maladie artificielle très similaire, soignant la première (similia similibus). »
Dans son essai il fait référence à sa première note dans le Cullen, et il dit qu’après mûre expérience, il pouvait dire non seulement que probablement, mais sans doute certainement, l’écorce guérit le paludisme parce qu’elle avait le pouvoir de produire de la fièvre intermittente. Il cita des exemples d’actions médicamenteuses bien connues pour étayer sa proposition, et esquissa de main de maître les caractéristiques d’un certain nombre de remèdes.

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