Encore l’effet placebo faute de mieux … Un médecin britannique explique sa « conversion » à la médecine conventionnelle

https://www.theguardian.com/science/blog/2012/apr/03/homeopathy-why-i-changed-my-mind?fbclid=IwAR1KLJIBj0O5absR4GIBIcw3IU-PqZHxTo85vjC4tnFsDVj9NhB2SBtvCms

Un article d’un médecin précédemment en faveur de l’homéopathie et qui a observé des améliorations importantes qu’il attribue au seul effet placebo, qui est réel dans toutes les thérapies, mais également une tarte à la crème tant elle n’a pas de contours précis. Malgré sa réalité, floue, c’est devenu une boîte où on y met tout ce qui ne peut être expliqué autrement…

Bien que je sois en mesure d’accepter que le placebo ait une part importante dans l’intervention homéopathique, ce qui est très bien tant que ça améliore la condition du malade, je trouve les raccourcis de ce médecin peu convaincants. Alors oui, tôt ou tard on devra pouvoir démontrer les effets cliniques homéopathiques de manière formelle, mais c’est important de comprendre les limites de l’exercice formel actuel qui a déjà conclu à la non dangerosité de nombre de molécules qui se sont révélées par la suite une catastrophe sanitaire ; et admettre ques les protocoles actuels sont uniquement adaptés à l’évaluation d’un nombre très réduit de substances (normalement une seule, pour limiter les variables interférant avec le résultat)..

L’auteur délimite ainsi l’effet placebo, à tort ou à raison :
« Placebo effects are notoriously unreliable; the patient who benefits today might not do so tomorrow. Placebo effects also tend to be small and short-lived. »
— Les effets placebo sont notoirement non fiables ; le patient qui en bénéficie aujourd’hui pourrait ne pas en bénéficier demain. Les effets placebo tendent aussi à être petits et de courte durée.

Et c’est là qu’on a un problème avec l’homéopathie, car elle a montre parfois une plus grande efficacité que certains médicaments que l’effet placebo ne peut expliquer à lui seul. L’effet placebo devrait s’appliquer de manière égale à la fois au médicament approuvé qui pourtant échoue parfois à traiter une condition de très longue durée, qu’au remède homéopathique qui curieusement les guérit durablement, en contradiction avec le principe énoncé de « courte durée ».

À un moment il faudrait être cohérent. Si ce principe est vrai, alors on pourrait raisonnablement avancer qu’on ne peut réfuter l’effet thérapeutique d’un remède homéopathique lorsque cet effet est durable, voire définitif (la grande utilité de l’homéopathie est sur les cas chroniques). Cet effet peut être rapporté dans un très grand nombre de cas, même si on prend soin d’éliminer légitimement tous les cas où il est difficile de différencier la guérison spontanée de l’effet thérapeutique homéopathique … c’est le cas par exemple lorsqu’on admet qu’on a soigné un rhume avec l’homéopathie entre 3 et 5 jours, ce qui correspond au cours normal de cette pathologie dans la grande majorité des cas.

Par ailleurs il faut répéter que lorsque l’hypothèse testée par un essai est l’efficacité d’un remède homéopathique ou d’une substance médicamenteuse, la conclusion statistiquement non significative ne démontre pas formellement l’inefficacité du traitement donné, quel qu’il soit, seulement l’aspect non concluant de l’essai. Le protocole standard n’est pas fait pour démontrer l’inutilité d’un traitement, juste son effet thérapeutique et/ou ses effets adverses, il ne peut que le laisser supposer à l’interprète des résultats. Ce que les détracteurs ne manquent pas de faire à chaque fois.
La mode est d’ailleurs d’ajouter des statistiques aux statistiques en effectuant des revues d’essais publiés (des méta-études) en ne retenant que ceux ayant été reconnus posséder la qualité attendue.

Pour chaque essai clinique, le responsable de l’étude décide lui-même du niveau de référence attribué à l’effet placebo. Comme l’effet placebo est variable d’une personne à l’autre, qu’il peut expliquer jusqu’à plus de 60% de l’effet, quel niveau choisir ? Si nous choisissons une limite de 50%, parfaitement arbitraire, à l’effet placebo, on s’attend à ce que l’efficacité clinique dépasse ces 50% pour être attribué à un effet thérapeutique. Mais pour tout médicament, avoir un niveau d’efficacité de plus de 50% est déjà considéré comme inespéré. C’est déjà plus que la majorité des médicaments vendus en pharmacie… idéalement, chaque intervention homéopathique devrait être comparé à la fois avec l’effet placebo, aussi imparfait soit-il, et un médicament de référence. Car même si le résultat ne dépasse pas le seuil de l’effet placebo pour l’étude, cela peut démontrer un meilleur résultat pour le remède homéopathique que pour la substance médicamenteuse de référence. La difficulté inhérente à ces essais, c’est qu’on ne prescrit pas un remède homéopathique de la même manière qu’une substance allopathique (antipathique) unique. L’objectif de la pharmacologie moderne est de pouvoir s’assurer que la substance médicamenteuse est délivrée d’une manière uniforme chez tous les malades ciblés par le traitement. Un remède homéopathique est prescrit après avoir fait correspondre l’ensemble des symptômes du malade avec ceux attribués au remède lors de précédents provings (mises à l’épreuve sur des malades sains).
Ce défi de l’homéopathie n’est pas une tentative sournoise de se soustraire au formalisme scientifique, c’est un fait. Il est impossible de tester l’homéopathie sans respecter à la lettre ses théories. Quoiqu’on pense du modèle, seule une application stricte des principes homéopathiques peut garantir l’effet thérapeutique optimal. Cela ne sert à rien de tester des hypothèses sur une base bancale.
Les conditions nécessaires au test, c’est l’évaluation des malades selon les profils homéopathiques qui permette de les intégrer à l’un des groupes d’une cohorte. Par exemple, pour une pathologie conventionnelle unique telle qu’un bronchite, on peut pour y faire correspondre un certain nombre de remèdes (Bryonia, Gelsemium, Baptisia, etc.). L’enjeu est ici de pouvoir recruter un nombre suffisant de malades qui puissent être évalués par un groupe d’homéopathes classiques afin de leur attribuer un des groupes de remèdes. Dans les faits, puisque l’homéopathie n’est pas une discipline normalement acceptée en milieu hospitalier, comment intégrer un nombre suffisamment de sujets ? C’est presque impossible. Et si la taille de la cohorte est insuffisante, d’emblée l’étude clinique sera trop faible pour qu’n en tienne compte. Le résultat sera toujours interprété comme un échec.
C’est la raison pour laquelle, la communauté homéopathique continue de dépendre entièrement sur la collecte et la mise en commun de cas issus de la pratique privée. Bien-sûr, ceci est insuffisant pour une recherche scientifique de qualité.

Cependant, il faut vraiment trouver une manière de tester les remèdes homéopathiques, malgré toutes ces difficultés, avec le formalisme attendu dans la recherche médicale, quoique imparfait et inadapté aux médecines non conventionnelles qui se veulent holistiques. Pour cela il faut leur laisser le temps pour monter en maturité avec leur manque de moyens, se contenter d’une notion de plausibilité faute de mieux.
Mais les mêmes détracteurs qui se plaignent que les médecines non conventionnelles sont incapables de démontrer leur effet thérapeutique dans les essais cliniques, voudraient leur interdiction pure et simple. Si ces médecines sont interdites comment organiser des essais cliniques ? C’est un cercle vicieux créé en conscience par une communauté excédée qu’on puisse penser trouver ailleurs que dans nos modèles actuels, une manière de soigner les gens. Aujourd’hui que la médecine est devenue orthodoxe et institutionnalisée, je ne vois pas comment on pourra laisser la place aux thérapies alternatives et complémentaires, sauf à leur accorder le bénéfice du doute, à défaut de leur reconnaître de possibles effets secondaires et un intérêt économique compte tenu des dépenses croissantes en matière de santé.

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